Marina Abramovic: Du Musée à la Cour de Justice
- Cécile Colleville
- 26 oct. 2016
- 3 min de lecture
Le 21 septembre 2016, la maître de la performance, Marina Abramovic, s’est finalement vue ordonner de payer 250 000 euros à son ancien collaborateur et compagnon Frank Uwe Laysiepen dit Ulay.

Marina Abramovic & Ulay / Photo: © VBK, Wien, 2011
Marina Abramovic, née le 30 novembre 1946 à Belgrade, commence sa carrière à New- York au début des années 1970. L’artiste a marqué l’histoire de l’art avec des performances explorant les limites du corps humain et les capacités de l’esprit. Pionnière de l’usage de la performance comme forme d’expression artistique, Marina Abramovic a exposé dans de nombreuses institutions européennes et étasuniennes notamment au Centre Georges Pompidou de Paris en 1990, la Neue National Galerie de Berlin en 1993 et a participé à de nombreuses manifestations artistiques internationales telles que la Biennale de Venise et la Documenta de Kassel.
Relation in time – Abramovic / Ulay (1977)
Dans les années 1970-1980, Ulay et Marina Abramovic vivent une histoire aussi passionnelle que productive. Pendant plus de dix ans, les deux artistes créent des œuvres et réalisent des performances uniques et inédites dans lesquelles ils mettent en scène leur intimité et leur complicité. En 1988, ils affichent publiquement leur séparation avec une performance réalisée sur la Grande Muraille de Chine, où chacun s’est assis à l’une des extrémités de ce monument historique. Après onze années de rupture, le galeriste Sean Kelly leur conseille de reprendre contact afin de mieux exploiter et gérer leurs créations, ce qui sera possible grâce à l’élaboration d’un contrat signé à Amsterdam en 1999.
Tombé peu à peu dans l’oubli, l’artiste allemand Ulay fait reparler de lui lors de l’exposition de 2010 The Artist is Present au MoMA. Durant cette manifestation culturelle, Marina Abramovic est restée assise durant sept cent heures sur une chaise. En face d’elle, une table et une chaise invitant des étrangers à s’asseoir et à la regarder dans les yeux. Alors que cette expérience provoqua toutes sortes de réaction chez les visiteurs, l’artiste resta stoïque et immobile. Pourtant, l’artiste fut particulièrement surprise et bouleversée lorsque Ulay s’installa devant elle. Ces retrouvailles émouvantes étaient loin de laisser envisager à l’artiste, le conflit judiciaire qui allait les opposer.

The artist is present – Marina Abramovic (2010)
C’est en 2015 que Ulay saisit le tribunal d’Amsterdam pour violation, par son cocontractant, Marina Abramovic, des obligations contractuelles établies dans le contrat de 1999. Dans celui-ci, il était convenu un partage des royalties pour tous les travaux communs, visant ainsi tous les « re-enactment » de performances créées par les deux artistes. Lors du procès, Ulay prouva qu’il ne fut payé seulement que quatre fois en seize ans et critiqua le manque de rigueur de l’artiste-performeuse qui ne lui procurait aucun document attestant de ventes d’oeuvres communes.
La cour d’Amsterdam trancha en faveur d’Ulay, condamnant Marina Abramovic à payer, en plus des 23 000 euros de frais judiciaires, le paiement rétroactif de 20% des ventes réalisées, au titre de royalties, ce qui représente un total de 250 000 euros. Elle a également ordonné à l’artiste de fournir tous les documents permettant d’établir une liste d’oeuvres vendues ou reproduites depuis 2007. Enfin les œuvres communes devront dorénavant être réattribuées strictement sous l’appellation «Ulay/Abramovic» pour les œuvres de 1976 à 1980 et « Abramovic/Ulay » pour les œuvres de 1981 à 1988.
Sources : -The Guardian https://www.theguardian.com/artanddesign/2016/sep/21/ulay-claims-legal-victory-in-case- against-ex-partner-marina-abramovic -Marina Abramovic Institute http://www.marinaabramovic.com/bio.html -MOMA http://www.moma.org/interactives/exhibitions/2010/marinaabramovic/marina_exhibition.html
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